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ISSN : 2755-3755

Un oiseau gelé depuis 46~000 ans découvert dans le pergélisol de Sibérie

Publié le 06.04.2020 - Article d'Emeline Férard du 24/02/2020 sur GEO
Dans le nord-est de la Sibérie, des scientifiques ont découvert les restes d'un oiseau piégé dans le pergélisol depuis quelque 46.000 ans. D'après leur étude, le spécimen très bien préservé est une alouette et pourrait être l'ancêtre des sous-espèces aujourd'hui observées

Après le poulain vieux de 40.000 ans et Dogor, le « chiot » vieux de 18.000 ans, c’est une nouvelle créature du passé qui a émergé des sous-sol gelés de la Sibérie. A proximité de la localité de Belaya Gora dans le nord-est de la Russie, des scientifiques ont mis au jour en 2018 les restes d’un oiseau disparu depuis quelque 46.000 ans. Un spécimen qui a montré un remarquable état de conservation.

Après avoir mené une étude approfondie sur l’oiseau, les chercheurs ont réussi à percer ses secrets qu’ils dévoilent dans un rapport publié par la revue Communications Biology. En plus de son âge, ils ont déterminé que l’individu était de sexe féminin et plus important, qu’il appartient à l’espèce Eremophila alpestris, plus connue sous le nom d’alouette hausse-col.

L’ancêtre commun de deux sous-espèces

Reconnaissable aux motifs jaunes et noirs de sa face, cet oiseau migrateur possède une vaste aire de distribution au sein de l’hémisphère nord. On distingue cependant de nombreuses sous-espèces dont deux sont présentes dans cette partie de l’Asie, une en Sibérie appelée Eremophila alpestris flava et une dans les steppes de Mongolie et de Chine nommée E. a. brandti.

Si l’on savait que l’origine de cette alouette remonte à plusieurs milliers d’années, la découverte livre des informations précieuses aux scientifiques. L’analyse génétique menée suggère en effet que le spécimen mis au jour constitue l’ancêtre commun des deux sous-espèces précédemment citées, offrant un aperçu de l’évolution que les populations ont pu connaître.

Grâce à cet oiseau, les chercheurs espèrent aussi en apprendre plus sur l’environnement du nord de l’Europe et de l’Asie durant le dernier âge de glace. Car ce milieu n’abritait pas que des alouettes mais aussi d’autres créatures désormais éteintes telles que les mammouths et les rhinocéros laineux. Et l’évolution de ces espèces s’avère étroitement liée aux conditions climatiques et environnementales.

Une théorie avance que l’écosystème de la région formait autrefois une mosaïque d’habitats. On y trouvait ainsi à la fois des steppes, de la toundra et des forêts de conifères. Jusqu’à la fin de la période glaciaire où ce que les scientifiques appellent la « steppe à mammouths » s’est divisée en différents biotopes : de la toundra au nord, de la taïga au milieu et de la steppe au sud.

Aujourd’hui, la découverte de l’oiseau semble confirmer ce scénario et l’influence des changements climatiques dans la formation de nouvelles sous-espèces. « Nos résultats soutiennent cette théorie dans la mesure où la diversification de l’alouette en ces sous-espèces semble s’être produite à peu près au même moment que la steppe à mammouths a disparu », explique dans un communiqué, Love Dalén, professeur au Muséum suédois d’histoire naturelle et co-auteur de l’étude.

Un état de conservation « exceptionnel »

S’il n’est pas rare de trouver des spécimens bien préservés dans le pergélisol sibérien, les chercheurs ont décrit l’état de ce petit oiseau enfoui à sept mètres sous la surface comme « exceptionnel ». D’autant plus qu’il s’agirait d’une découverte inédite. « A notre connaissance, aucune carcasse d’oiseau gelé n’a été décrite à partir de dépôts de pergélisol du Pléistocène supérieur », écrivent les chercheurs dans leur rapport.

« Le fait qu’un spécimen aussi petit et fragile soit resté quasi intact suggère que la poussière a dû se déposer de façon progressive, ou au moins que le sol était relativement stable pour que la carcasse de l’oiseau soit préservée dans un état proche de celui de sa mort », appuie pour CNN, Nicolas Dussex, chercheur à l’université de Stockholm qui a participé aux recherches.

Grâce à sa conservation, l’équipe espère être en mesure de décrypter le génome complet de l’alouette de 46.000 ans et de le comparer avec ceux de toutes les sous-espèces actuellement répertoriées. Néanmoins, l’oiseau est loin d’être le seul spécimen identifié dans la région de Belaya Gora puisque les fouilles ont également permis d’y exhumer des restes de mammouth, de loup ou encore de lion des cavernes…

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