Conseil parlementaire sami : 30 ans de coopération sur la glace
Un retour au temps de la Guerre froide, voici comment est décrit le climat actuel en Arctique, après l’invasion russe en Ukraine, le 24 février dernier. Markku Heikkilä, directeur des communications du centre de recherche arctique de l’Université de Laponie, en Finlande, et Christina Henriksen, présidente du Conseil parlementaire sami, affirment que la coopération arctique est complètement déstabilisée et que certaines organisations se retrouvent divisées.
Le Conseil parlementaire sami n’y échappe pas. Deux groupes représentant les intérêts des Samis de Russie évoluent au sein du conseil. Une de celles-ci, la Kola Saami Association, a manifesté son soutien à l’endroit de Moscou quelques jours après le début de l’offensive militaire.
Pour Christina Henriksen, une décision devait être prise. Alors que le 28 février, l’organisation a publié un communiqué rédigé par les deux groupes représentant les Samis de Russie, statuant que ceux-ci « se retrouvaient dans une situation extrêmement instable, voire dangereuse » et qu’ils devaient être soutenus ; le 10 avril dernier, une pause formelle est annoncée. « Le Conseil parlementaire sami suspend la coopération avec nos organisations membres du côté russe », peut-on lire sur son site Web. Rejointe par vidéoconférence, Christina Henriksen avoue que ce fut une décision crève-cœur, qui a été prise avant tout pour protéger les partenaires, les collègues et les relations en territoire russe.
Ironie du sort, celle-ci s’apprêtait à fêter les 30 ans de collaboration arctique cet été, alors que la première organisation défendant les droits des Samis en Russie s’est jointe au conseil en 1992.
Dégradation des relations
Le 3 mars, sept des huit États permanents du Conseil de l’Arctique annonçaient une pause de leur implication au sein de l’organisme multilatéral, sous présidence russe jusqu’en 2023. Depuis, plusieurs autres organismes de l’Arctique ont annoncé la suspension des liens diplomatiques avec Moscou, comme le Conseil nordique des ministres et le Conseil des États de la mer Baltique.
Or, la collaboration avec la Russie était déjà ardue, même avant le conflit en Ukraine. La présidente Henriksen a noté « un certain progrès au cours des dix dernières années, en ce qui concerne la démocratie, la liberté d’expression et la liberté des peuples autochtones du côté russe. Les organisations des peuples autochtones ont ressenti plus de pression et il y a eu des changements de leadeurship », ajoute-t-elle. Elle précise que les liens informels ne sont présentement pas coupés et qu’elle maintient certains échanges avec des membres de la communauté samie en Russie.
Pendant ce temps, l’Association des peuples autochtones du Nord, de la Sibérie et de l’Extrême-Orient de la Fédération de Russie (RAIPON) – une des plus grandes organisations autochtones du pays qui siège au Conseil de l’Arctique – a annoncé son soutien sans équivoque envers l’offensive russe. Sans surprise pour Mikkel Berg-Nordlie, chercheur à l’Institut norvégien de recherche urbaine et régionale, qui affirme que la fragilisation des relations remonte à près de 10 ans. « En 2013, il y a eu un changement controversé de direction à RAIPON. Le candidat le plus populaire à la direction a été contraint de se retirer des élections, explique-t-il. Depuis, RAIPON opère essentiellement sous le contrôle du gouvernement russe. Cela complique autant la coopération internationale que sa légitimité démocratique »…
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