La difficile protection des baleines franches dans les « eaux les plus industrialisées au monde »
Elles font entre 13 et 17 mètres de long et pèsent entre 45 et 65 tonnes… Les baleines franches de l’Atlantique Nord ont beau être des forces de la nature, elles n’en sont pas moins en danger critique d’extinction. Et la dernière estimation de leur population, réalisée par le North Atlantic Right Whale Consortium (NARWC), n’invite pas à l’optimisme.
Fin octobre, ce consortium nord-américain engagé pour la conservation de l’espèce, qui réunit des chercheurs, des associations de conservation, des représentants de la filière pêche…, a publié son estimation de la population de baleines franches d’Atlantique Nord en 2020. Elle n’était plus que de 336 individus, en baisse de 8 % par rapport à 2019 et de près de 30 % sur la dernière décennie.
La proie favorite des chasseurs
Ce n’est pas la première situation critique à laquelle sont confrontées ces baleines. Pendant des siècles, elles ont été l’objet d’une intense chasse à but commercial, qui a démarré au large des côtes basques au XIe siècle. « Ces baleines franches d’Atlantique du Nord étaient présentes dans le Golfe de Gascogne jusqu’au XIXe et XVe siècles avant de disparaître sous la pression de la chasse baleinière », rappelle l’océanologue Christophe Guinet, chercheur du CNRS au Centre d’études biologiques de Chizé (CEBC). « Cette chasse s’est poursuivie sur d’autres mers, de l’autre côté de l’Atlantique, et s’est même accentuée avec la révolution industrielle et la mise au point de techniques de pêche toujours plus efficaces. Jusqu’à pousser un grand nombre d’espèces de cétacés quasi à l’extinction ».
Les baleines franches d’Atlantique du Nord sont restées des proies favorites des baleiniers. « Elles sont relativement lentes et échappaient donc difficilement aux bateaux. Et, en raison de leurs importantes réserves de graisse, elles flottaient à la surface une fois harponnée, quand les rorquals coulaient », explique Christophe Guinet. D’où leur nom d’ailleurs, les « right whales »… les « bonnes baleines ».
Une centaine d’individus en 1935
Les baleines franches d’Atlantique Nord sortent décimées de ces siècles de pêche intensive qui prennent fin, pour cette espèce, en 1935. « D’une population estimée à 20.000 individus avant cette période de chasse, les baleines franches sont passées à une centaine », indique Sharon Livermore, directrice de la Conservation marine au Fonds international pour la protection des animaux, ONG internationale. Profitant de leur statut d’espèce protégée, les effectifs se reconstituent peu à peu. Un processus forcément long « alors que ces baleines se reproduisent à une fréquence très faible », rappelle Christophe Guinet. « Les femelles donnent naissance à un baleineau tous les cinq à dix ans, et tous ne survivent pas »…
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