La Suisse se profile sur les petites plateformes de recherche en Arctique
Pourquoi c’est intéressant
Toutes ces initiatives s’inscrivent dans l’attrait accru que suscite l’Arctique, sur le plan scientifique mais aussi bien sûr géopolitique. Surtout, ces petites plateformes sont très intéressantes dans le sens où elles permettent de complémenter les recherches menées par les immenses brise-glaces, très coûteux et moins maniables. Pour la Suisse, c’est un nouveau champ dans lequel pourrait rayonner la recherche helvétique.
Le projet Forel
L’objectif est double et clairement affiché par Patrick Aebischer, président émérite de l’EPFL et président de la Swiss Polar Foundation (SPF) :
« D’une part, construire un voilier à la coque renforcée en aluminium permettant de naviguer dans les eaux arctiques en présence de glace flottante – ce type de petit navire sont aujourd’hui peu nombreux. D’autre part, l’idée est de penser sa conception spécifiquement pour permettre d’y installer des équipements scientifiques de pointe. En ce sens, notre modèle est le Eugen Seibold ».
Ce voilier allemand de 24 m, financé par la Werner Siemens-Stiftung, baptisé en 2019 et exploité sous l’égide de Gerald Haug, professeur de paléoclimatologie à l’ETHZ et au Max Planck Institute de Mainz (Allemagne), héberge un condensé d’instruments d’analyses « dernier cri », ce qui en fait le petit laboratoire flottant le plus sophistiqué au monde. Il peut accueillir huit passagers mais n’a qu’une coque en polyester – trop frêle pour l’Arctique.
Le Forel, lui, devrait emmener quatre scientifiques pour autant de membres d’équipage. Les plans ont été arrêtés ce printemps, et plusieurs chantiers navals doivent être mis en concurrence pour sa construction, au prix le plus avantageux. Quant au financement, Patrick Aebischer dit être en train de lever les fonds nécessaires auprès de mécènes et fondations. L’exploitation du navire, baptisé en hommage au savant vaudois François-Alphonse Forel, reviendra à environ un demi-million par an, assurée à travers des projets scientifiques financés par les voies habituelles (étatiques voire privées). Première navigation prévue en 2022, si tout se passe comme prévu.
Car en parallèle, Patrick Aebischer explore encore des pistes pour acquérir à moindres coûts l’un des rares voiliers existants à coque renforcée, qui pourrait être transformé en laboratoire flottant, pour autant que les dimensions du navire et sa configuration s’y prêtent.
Les autres initiatives à venir. Il en existe plusieurs :
– L’équipe de la Fondation Tara Océan qui a déjà à son actif plusieurs odyssées scientifiques, dont un hivernage au pôle Nord durant les nuits polaires de l’Année polaire internationale (2007-2008), ambitionne de construire une plateforme dérivante pour se laisser coincer dans la banquise arctique chaque hiver durant les deux prochaines décennies ; un projet à plusieurs dizaines de millions d’euros en cours de développement qui doit être dévoilé en fin d’année, a appris Heidi.news.
– La Fondation Pacifique, à Genève, dont l’une des embarcations vient de réaliser un tour du monde à la voile en quatre ans dans le sillage de Magellan, a lancé ce 8 juin dernier une immense expédition prévue pour durer entre 2020 et 2024. Le navire vient de quitter la Bretagne, pour rejoindre d’abord le Nord de la Norvège, avant le Groenland cet été. Samuel Gardaz, vice-président : « L’objectif est de faire un tour de cinq ans dans l’Océan arctique par l’ouest à bord de la goélette à coque en acier de 30 m Mauritius, en collaboration scientifique avec l’Université de Genève (Unige), mais également dans un but socio-éducatif ».
– Le voilier suisse Gaia, barré par Thierry Courvoisier, professeur émérite d’astrophysique à l’Unige, doit lever l’ancre le 15 juin, moins dans un but purement scientifique que dans celui de sensibiliser le grand public aux impacts du réchauffement dans l’Arctique…
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