Le sort de l’Arctique concerne toute la planète
C’est comme si les chiens de traîneau marchaient sur l’eau. En juillet 2019, les images du chercheur danois Steffen Olsen font sensation. Parti récupérer des instruments de mesure sur le fjord d’Inglefied au Groenland, il voit son expédition brutalement stoppée. « La fonte des glaces en été est normale et les inondations ont déjà été observées, mais les températures de 17 °C à Qaanaaq sont extrêmes au début de juin », expliquait alors le chercheur sur son compte Twitter.
Malgré tout, les événements extrêmes de ce type se multiplient. En cet été 2020, des images également spectaculaires ont été observées et largement relayées sur les réseaux sociaux : des incendies en Sibérie, la fonte d’une partie du permafrost ayant fragilisé des infrastructures minières et pétrolières, des records de température battus au sein du cercle polaire…
Que disent ces images spectaculaires ?
« Le réchauffement climatique n’est pas homogène », explique Sabrina Speich, professeur de géosciences et membre du Laboratoire de météorologie dynamique (LMD) de l’École normale supérieure (ENS). « Il est estimé actuellement à une moyenne de 1,1 °C par rapport à l’ère préindustrielle. Mais cela ne signifie pas qu’il a augmenté d’un degré partout. En réalité, la hausse est plutôt de 4 ou 5 °C dans les régions arctiques ».
La région arctique devenant de plus en plus chaude, et plus rapidement que d’autres parties du globe, cela « crée non seulement des impacts régionaux mais aussi des effets à plus grande échelle. La différence de température entre les régions tropicales et arctiques diminue et cause, par exemple, des événements atmosphériques plus persistant ou intenses ».
Les données de Copernicus, le programme d’observation de la Terre de l’Union européenne, montrent aussi combien la glace en Arctique diminue en périmètre et en épaisseur depuis le milieu des années 2000.
En quoi le sort de l’Arctique affecte toute la planète ?
« Les études scientifiques effectuées jusqu’à aujourd’hui imputent la différence de réchauffement climatique à la distribution des terres par rapport à l’océan à la surface du globe », précise Sabrina Speich, experte reconnue mondialement dans le domaine de la modélisation des océans.
« Cette distribution différente entre les deux hémisphères, mais aussi entre les bassins océaniques, fait que si l’océan transporte de la chaleur de l’Atlantique Sud vers l’Atlantique Nord et l’Arctique, via le courant du Gulf Stream et la dérive nord-atlantique, ce transport de chaleur, qui augmente d’année en année, impacte aussi la fonte de la banquise arctique et de la calotte glacière du Groenland. La fonte de la banquise arctique a comme effet d’augmenter l’absorption par l’océan de rayons solaires et donc d’augmenter encore plus la quantité d’énergie du système climatique ». L’océan absorbe et transforme en effet le rayonnement solaire qui est dans le spectre du visible en un rayonnement infrarouge.
« Ce surplus d’énergie qui s’accumule dans le système climatique terrestre va en partie réchauffer l’atmosphère (3 %), faire fondre la glace (3 %) mais la grosse majorité, 94 %, est absorbée par l’océan ». Engloutie même dans l’océan, « elle est transportée loin par les courants de subsurface et profonds. Cette chaleur sera peu à peu redonnée à l’atmosphère sur des échelles de temps très longues »…
Lire la suite sur La Nouvelle République