Recherches Arctiques

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ISSN : 2755-3755

Les optimistes du climat : Percer les secrets de l’Arctique

Publié le 04.05.2023 - Article de Ben Herremans du 03/05/2023 sur Le Vif
En mai 2023, la paléoclimatologue britannique Gina Moseley entreprendra une expédition au Groenland pour descendre dans la grotte la plus septentrionale du monde. Un site où personne n’a mis les pieds avant elle. Son ambition ? Étudier et mieux comprendre la sensibilité climatique de l’Arctique. Gina Moseley a reçu le Prix Rolex à l’esprit d’entreprise en 2021

Accélération du réchauffement de l’Arctique

Le sort de l’humanité pourrait bien se décider au Groenland. L’Arctique se réchauffe en effet deux à trois fois plus vite que le reste de la planète. La glace du Groenland fond à un rythme encore jamais enregistré. En 1990, les scientifiques avaient estimé que la fonte des glaces était de 25 milliards de tonnes par an. Aujourd’hui, un consortium de 89 scientifiques a analysé la fonte des glaces actuelle en s’appuyant sur les données de 1992 à 2018 de 26 satellites pour évaluer les effets du réchauffement de la planète sur le Groenland. Les résultats de cette étude publiés dans le magazine scientifique Nature, montrent qu’entre 1992 et 2018 le Groenland a perdu 3,8 trillions de glace. Ce qui veut dire que la fonte des glaces est passée de 25 milliards à 234 milliards de tonnes par an et a multiplié par neuf la vitesse de fonte. En terme de perspective, 3,8 trillions de tonnes de fonte de glace du Groenland déversées dans l’océan entre 1992 et 2018, équivaut à verser le contenu de 120 millions de piscines Olympiques dans l’océan tous les ans pendant 26 ans. Toute cette eau représente une montée du niveau de la mer de plus d’1 cm, en ce qui concerne le Groenland.

Le réchauffement des régions polaires fait peser une menace d’inondation sur de nombreuses grandes villes du monde. Les terres gelées du Groenland ont aussi un impact sur les régimes des précipitations, la formation des glaces, les courants océaniques et les systèmes météorologiques, avec des conséquences importantes à l’échelle mondiale, jusque dans les zones densément peuplées de notre planète.

La découverte d’une grotte géante

C’est de façon tout à fait fortuite, dans un pub de Bristol, que la professeure britannique Gina Moseley, climatologue à l’université d’Innsbruck (Autriche), entend parler en 2008 de la Higginshule, une grotte géante située dans le Wulff Land.

Le Wulff Land, une péninsule dans l’extrême nord-ouest du Groenland, est une région de montagnes, rude et inhospitalière, dans laquelle aucune trace d’habitation humaine n’a jamais été trouvée. Cette péninsule est rattachée par son flanc sud au continent et à la calotte glaciaire. Le Wulff Land lui-même n’est pas glaciaire mais est recouvert de névé, un amas de neige agglomérée en gros grains, entre neige et glace.

La Higginshule (également appelée Grotte de Wulff Land) a été découverte en 1958. En pleine guerre froide, l’US Air Force et l’US Geological Survey menaient dans le nord du Groenland une recherche intensive de terrains dépourvus de glace permettant à des avions d’atterrir.

C’est pendant un vol de reconnaissance qu’un pilote de l’US Air Force repère ainsi et photographie une grotte géante de plusieurs dizaines de mètres de large et de profondeur, à 81,8° N. D’autres grottes furent encore découvertes à proximité par la suite. La photo fut envoyée au département de géographie de l’université de Bristol (Royaume-Uni).

Depuis, cette grotte a habité les rêves de nombreux spéléologues, mais personne ne s’y est jamais rendu, en raison de la difficulté d’accès et de la logistique coûteuse qu’implique une expédition vers cette destination presque inaccessible. Et la grotte est donc restée inviolée jusqu’à ce jour.

Naissance d’une vocation

Entre Gina Moseley et la spéléologie, c’est une longue histoire. La première fois qu’elle entre dans une grotte, elle a 12 ans. « Nous étions en vacances en famille dans un camping à Cheddar, dans le Somerset. De nombreuses activités étaient proposées : de l’escalade, du canoë-kayak, et aussi de la spéléologie. Ma mère a choisi la spéléo et je l’ai accompagnée. J’ai été bouleversée. J’ai adoré le fait de crapahuter sous terre sans savoir ce qui se cache derrière le prochain tournant. Après cet été-là, j’ai eu envie de passer tout le temps que je pouvais dans des grottes. Nous sommes retournés plusieurs fois au même endroit. Je consacrais toutes mes économies à la visite de grottes ».

Projet Greenland Caves

Gina Moseley a déjà trois expéditions au Groenland à son actif. « En 2015, avec une petite équipe motivée de cinq personnes, nous avons analysé le potentiel d’exploration de grottes dans le nord-est du Groenland », écrit-elle sur le site Northern Caves 2023. « Un petit bimoteur Twin Otter nous a déposés à 80° de latitude nord, puis nous avons traversé un lac de 20 kilomètres de large dans un canot gonflable, et nous avons ensuite marché pendant trois jours (il faisait jour 24 heures sur 24) avant d’enfin arriver aux grottes. Là, nous avons trouvé plus de grottes que ce à quoi nous nous attendions ».

Cette première expédition a été suivie en 2018 par l’expédition EAGRE18, sur la côte est du Groenland. « Pour réduire l’empreinte de notre expédition, nous avons fait la traversée de l’Islande au Groenland à la voile ». Un an plus tard, le projet Greenland Caves ramenait Gina dans le nord-est du Groenland avec une équipe pluridisciplinaire composée de paléoclimatologues, de géologues, de glaciologues et d’un géomicrobiologiste…

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