Surveillance militaire en Arctique : « Copenhague doit manœuvrer avec prudence »
La Croix : Le Danemark, outre un renfort des moyens aériens et navals, entend investir dans un nouveau radar pour étoffer la surveillance au-dessus du Groenland. Pourquoi Copenhague devait-elle revoir sa stratégie de défense dans la région ?
Camille Escudé : Le Danemark a été le dernier pays de la région à publier une stratégie de défense, pour la période 2011-2020. Copenhague doit manœuvrer avec prudence au Groenland, qui a un statut post-colonial de territoire autonome, et qui pourrait un jour accéder à l’indépendance. Le gouvernement danois se devait néanmoins de renouveler son ambition, alors que les grandes puissances ont réinvesti l’Arctique, et particulièrement au Groenland, très riche en ressources minières notamment (uranium).
Il s’agit donc de marquer le terrain, même si on ne peut pas parler d’escalade. On joue beaucoup à se faire peur dans cette zone du globe, mais il est hautement improbable d’en venir à un conflit. Les enjeux économiques sont trop grands. C’est pourquoi la coopération entre les flottes militaires domine, avec des usages civils comme le sauvetage en mer.
En 2019, Donald Trump avait défié la chronique en proposant de racheter le Groenland au Danemark. Copenhague peut-elle miser sur une nouvelle donne en Arctique, depuis que la Maison-Blanche a changé de locataire ?
C. E. : On s’est beaucoup moqué de cette proposition, cela a vexé les Groenlandais, mais ce n’était pas la première offre des États-Unis. Et rappelons qu’il y a déjà eu un précédent de ce type, avec l’achat de l’Alaska en 1867. L’administration de Joe Biden devrait poursuivre une politique d’influence, mais en s’y prenant de manière moins polémique, et avec une sensibilité pour l’environnement affichée.
Parmi ses toutes premières décisions, le nouveau président américain a décrété un moratoire sur la prospection d’hydrocarbures sur une grande réserve faunique en Alaska, ce qui était très attendu par les populations autochtones. Cela marque sans doute un infléchissement pour le reste de son mandat…
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