Recherches Arctiques

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ISSN : 2755-3755

«Trump et le Groenland: derrière le coup médiatique, un objectif stratégique»

Publié le 02.09.2019 - Article de Paul Sugy (interview de Mikå Mered) du 22/08/2019 sur Le Figaro
Donald Trump a proposé d’acheter le Groenland, déclenchant une crise diplomatique avec le Danemark. Derrière le propos tonitruant, il y a une réalité: le cercle arctique représente un enjeu majeur pour Washington, Moscou et Pékin, explique le professeur de géopolitique Mikå Mered

Mikå Mered est professeur de géopolitique des pôles Arctique et Antarctique à l’Institut Libre d’Étude des Relations Internationales (ILERI) à Paris. Son ouvrage « Les Mondes polaires » (PUF, 2019) sortira en librairie le 16 octobre.

FIGAROVOX.– Donald Trump a surpris le monde entier en annonçant son souhait de racheter au Danemark le Groenland. On aurait pu croire à une plaisanterie, si le président américain n’avait pas annulé une visite officielle au Danemark suite à la fin de non-recevoir opposée par Copenhague. Ce projet est donc sérieux ?

Mikå MERED.– Donald Trump est un communiquant qui prouve depuis plus de trois ans qu’il sait saturer l’espace au moyen de déclarations chocs et inhabituelles. L’idée d’acheter le Groenland, que personne n’avait vue venir, est une proposition idéale de ce point de vue. Mais ce n’est pas tout: Trump envoie également à l’international un nouveau message fort sur le regain d’intérêt des États-Unis pour l’Arctique et pour le Groenland tout particulièrement. Autrement dit, même si ce propos peut laisser penser qu’il s’agit d’une farce ou d’une lubie du Président américain, les enjeux sont bien réels.

Le véritable enjeu pour les États-Unis est d’affirmer leur réengagement dans l’espace arctique face à la Russie et à la Chine.

FIGAROVOX.– Pourtant, Trump sait probablement qu’il n’a aucune chance de parvenir à acquérir le Groenland…

Mikå MERED.– Bien sûr: il est évident que ni le Groenland ni le Danemark ne sont vendeurs. C’est ce que les deux gouvernements se sont empressés de répondre au président américain. Mais le véritable enjeu pour les États-Unis est d’affirmer toujours un peu plus leur réengagement dans l’espace arctique face à la Russie et à la Chine.

La stratégie mise en place par l’administration américaine depuis 18 mois repose sur deux piliers. D’une part, un redéploiement militaire rapide et fort. Les États-Unis multiplient désormais les exercices militaires, que ce soit dans un cadre national, bilatéral ou encore dans le cadre de l’OTAN. On peut citer en exemple l’exercice Trident Juncture 2018 réalisé à l’automne dernier à la frontière de l’Arctique entre l’Islande et la Norvège. C’est le plus grand exercice réalisé par l’OTAN depuis la Guerre froide… Les États-Unis ont fait naviguer un porte-avions au nord du Cercle polaire arctique pour la première fois depuis 1991 ! On peut également citer le repositionnement d’avions de lutte anti-sous-marine Poseidon P-8 en Islande. Evoquons aussi, en 2019, la publication de stratégies arctiques renouvelées par la marine, les gardes-côte et même, en juin dernier, le Département de la Défense dans son ensemble…

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