La succession des saisons est la conséquence d’une inclinaison de la terre sur son axe et de son orbite autour du soleil. Selon les théories actuelles, des horloges internes dites « biologiques » rythment nos vies. Innées, elles reflèteraient les périodicités des mouvements terrestres. Le biorythme le plus connu est dit « circadien », sur environ une journée. C’est celui qui donne le tempo du jour et de la nuit à notre corps, celui qui synchronise nos fonctions biologiques à la circonvolution de notre planète. Sensible à l’allongement des journées, il est dépendant de la luminosité ambiante pour induire d’autres biorythmes. Existe-t-il en particulier un rythme circannuel, sur une année ? L’Arctique, tellement particulier par ses hivers longs et ses étés brefs sous une relative clarté permanente, est justement un lieu propice à des recherches sur ce thème.
- Soleil de minuit en Arctique. Rovaniemi, Laponie finlandaise
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L’hypothalamus, une zone du cerveau, est considéré comme le siège potentiel de ces horloges, et serait également impliqué dans des chronopathologies on ne peut plus neurologiques, comme le sont… les migraines. Une équipe de neurologues norvégiens a publié en 2007 les résultats d’une enquête menée en zone arctique auprès de quatre-vingt-neuf femmes migraineuses. Recrutées auprès du grand public, elles ont accepté de recueillir en détail, pendant douze mois consécutifs, la survenue et la nature de leurs crises. Seules les patientes présentant des migraines avec aura (troubles neurologiques précédant les crises), accompagnées d’insomnies, subissaient des fluctuations saisonnières de leurs troubles. Etait-ce un facteur externe - environnement plus ou moins lumineux - qui provoquait ces crises ? Le pic de fréquence des accès migraineux survenait le 21 mai, au cÅ“ur des périodes d’ensoleillement maximal, sous le soleil de minuit [1]. Le facteur majeur influençant les troubles du sommeil et les crises est la transition jour/nuit qui s’amoindrit peu à peu pendant l’été polaire. Les migraineux avec aura sont d’ailleurs connus comme étant hypersensibles à une forte luminosité.
La lumière en soi provoquerait donc insomnies puis migraines par une aggravation de la photosensibilité, mais seulement chez certains sujets. Un biorythme circannuel n’est pas prouvé par cette étude ; les migraineux sans aura ne voient pas une aggravation de leurs troubles durant l’été polaire. Prouver un tel biorythme demanderait, tâche impossible, de faire vivre suffisamment de personnes sans changements de saisons, durant des années ; la répétition de crises, aux mêmes moments, malgré l’absence de variation lumineuse ambiante, serait alors un argument convaincant.
Toutefois les connaissances sur les relations entre lumière et biorythmes progressent. Au XXIe siècle, on parle de plus en plus de chronobiologie, de chronotypes [2], de chronothérapie et même des gènes « horloge » (appelé gènes CLOCK [3]). Des pathologies comme l’insomnie, les migraines et la dépression saisonnière bénéficient peu à peu de nouveaux traitements.